mardi 6 septembre 2016

Une enfance aux noms propres




Rue du Haut-Rocher, mais quand même pas le Mont Olympe, les sages-femmes m’ont accouché, déjà pas très volontaire, attendant de voir, CHU rayon maternité. Rue de l’Ermitage, ermite à quatre pattes, je découvrais le monde en commençant par la moquette. Rue Guynemer, ensuite, l’aviateur, dressé sur mes pattes arrière, j’ai levé le nez au ciel. À l’école maternelle de la rue Marcel-Cerdan, je serrais les dents, mais nous étions dans le quartier d’Hilard, ah ah ! alors je n’ai pas pris l’enfance trop au sérieux. C’est à l’école Saint-Exupéry, autre aviateur, que j’ai appris à lire, à écrire et à ne pas compter sur grand-chose. C’était place Augustine-Fouillé, « auteur du Tour du monde par deux enfants » : ces deux-là ont voyagé pour moi. L’école nous envoyait parfois prendre l’air à Noirmoutier ou au Collet d’Allevard. Les vacances se passaient à La Tranche-sur-Mer, Guérande, Saint-Malo, Pornic, La Trinité, La Baule ou Pralognan-la-Vanoise. Quartier du Bourny, rue Raymond-Garnier, « mort en déportation », j’ai continué à grandir, mais rue des Déportés, je me déportais souvent pour aller humer les livres à la librairie Siloë. C’est à la piscine du Viaduc que j’ai appris à ne pas savoir nager, et place de la Commune que j’ai construit mes barricades adolescentes. Les copains habitaient rue Pierre-Joseph Proudhon, rue Salvador-Allende ou allée Louise-Michel, mais on se regardait vieillir au collège Jacques-Monod, quartier des Fourches. Les promenades familiales se faisaient au jardin de la Perrine ou au bois de L’Huisserie, l’horizon local dépassait rarement la place du Onze-Novembre, la Porte Beucheresse ou le Leclerc de Saint-Nicolas. Au lycée Ambroise-Paré, on commençait à se cogner aux murs d’une ville-palindrome, Laval-Laval aller-retour, personne ne descend. Dans les salles d’examen du bac, au lycée Douanier-Rousseau, on espérait tous secrètement obtenir plus que la Mayenne.


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