jeudi 4 avril 2013

Le monologue intérieur



« La rêverie est le dimanche de la pensée. »
Henri-Frédéric Amiel, Journal intime.

           
Allez il faut s’y mettre le monologue intérieur qu’est-ce que j’ai à dire sur le monologue intérieur commencer par Dujardin évidemment Édouard Dujardin j’ai même pas lu Les Lauriers sont coupés d’ailleurs je crois pas qu’on lise beaucoup Dujardin de nos jours les universitaires peut-être à la rigueur enfin bon je connais un peu le sujet quand même ce passage au restau où il commande du poulet tout ce bavardage descriptif qui je connais j’ai lu ça quand même toutes ces descriptions façon flux de conscience mais bien trop ordonné tout ça bien trop précis des couleurs des objets en pagaille et on sait bien que la pensée intime ce n’est pas ça c’est complètem ‒ personne n’énumère comme ça dans sa tête tout ce qu’il a sous les yeux à moins d’être maniaque si je suis au restaurant ma pensée peut aller partout elle je vais pas nommer chaque objet que j’ai sous les yeux les serviettes pliées comme ci comme ça la pensée vagabonde je peux penser à mes prochaines vacances à ce que j’ai fait de ma journée aux gens rencontrés et revenir à la cuisson de mon poulet et repartir loin les factures à payer une fille à l’autre bout de la salle mes lectures du moment donc le monologue intérieur c’est déjà un mensonge et il faudrait commencer par ça par le mensonge juste un procédé comme un autre l’écriture automatique je pose les mots les uns à la suite des autres comme ils me viennent et hop voilà mon courant de pensée mon flux de conscience ‒ à moi Joyce et Beckett et Virginia Woolf le Nouveau Roman et tout ça où est-ce que j’avais lu qu’on ne pensait pas en alignant des mots les uns à la suite des autres mais par images il faudrait que je retrouve ça et Molly Bloom dans Ulysse on a vraiment là l’impression d’être dans un flot de pensées dans une conscience et une conscience ensommeillée succession d’idées sans lien entre elles parfois des fantasmes qui ressurgissent et tout le côté inconscient freudien tout ce qu’on veut là encore écriture composition agencement rien à voir avec un véritable flux incohérent et pourtant l’incohérence est là écrite par Joyce agencée par Joyce mais enfin on a le sentiment d’être quand même embarqué dans un esprit assoupi qui laisse aller toutes ses réflexions on se rapproche quand même de quelque chose même si encore une fois on est très loin de et moi bien sûr ma façon d’écrire là comme au fil de la plume sans ponctuation et d’avoir l’air de me creuser la tête de faire des ébauches mentales des machins évidemment c’est il faudrait que je rajoute des gros seins pour faire encore plus flot incontrôlé c’est bien ça des gros seins qui surgissent comme ça les jambes de ma voisine au café paf fantasme direct genre le mec qui réfléchit au monologue intérieur à son article à écrire et qui se laisse envahir par sa libido mais c’est des conneries c’est de l’écriture un pur mensonge déjà des mots comme ça ébauches mentales ou même libido ils me viennent pas si vite à la tronche putain d’arnaque on vous vend du monologue intérieur à vingt euros le bouquin tu parles c’est un truc complètement reconstruit bien rédigé pour faire vrai mais c’est du toc remboursez c’est comme la caméra subjective dans les films genre on vous fait croire que vous voyez à travers les yeux du héros non mais on nous prend pour des cons vous avez vu le champ de vision hyper réduit que ça a une caméra rien à voir avec la vue humaine putain remboursez ceci n’est pas une pipe quoi merde et alors pourquoi le mono ‒ pourquoi on s’est amusé avec le monologue intérieur au vingtième siècle et pourquoi je sais pas Ovide Chrétien de Troyes ou Montaigne s’en sont pas occupés d’ailleurs tiens Montaigne justement Les Essais ce retour permanent sur le texte pour le retravailler mais là je m’éloigne du sujet pourquoi le vingtième pourquoi le monologue intérieur au vingtième siècle et même déjà un peu avant déjà des traces chez Flaubert alors oui bien sûr le vingtième crise du sujet crise du narrateur vlan arrivée de Freud qui te fout de la névrose partout et de l’inconscient et les surréalistes qui cognent à la porte de l’inconscient ouvrez là-dedans ça nous branche nous les labyrinthes et les machins un peu obscurs tout ce qui déraille et pourquoi qu’on bande on veut savoir comment ça marche là-dedans ouvrez ou on défonce la porte avant ça les héros partaient faire la guerre et voyager pour se découvrir vraiment maintenant on voyage en soi-même c’est moins cher c’est la crise on fait plus la guerre on rentre plus à Ithaque Pénélope tu nous as fait quoi à bouffer non on reste peinard chez soi à se regarder le dedans.

1 commentaire:

Pierre Driout a dit…

Tes citations sont hyper-chiadées ! Qu'est-ce que tu monologues bien ... mon chou ! Ca ne te gêne pas que je t'appelle mon chou ?