Journal d'oisiveté
Juillet 2013
Lundi 1er
juillet.
Je rédige
mes deux dernières bios ce matin et les envoie en début d’après-midi. Pour que
le changement ne soit pas trop brusque après ce week-end parisien, le soleil a
décidé de s’afficher même à Laval, et je déambule entre les jambes des femmes
comme un bienheureux.
Puisque
c’est la période du Tour de France, j’ai décidé de retrouver Stevenson et son Voyage avec un âne dans les Cévennes.
Ce soir, je
vais voir Man of Steel. L’évangile
selon Clark Kent. Un Christ parfait, ce Superman : envoyé par son
père pour sauver l’humanité ; la première fois qu’on le voit apparaître
dans le film, il est barbu ; il est âgé de trente-trois ans ; et pour
enfoncer l’hostie, il s’envole avec les bras en croix en quittant son
père !... Le film est plaisant,
mais ce qui m’a frappé en le regardant, c’est qu’on ne croit pas une seconde à
la menace qui pèse sur la Terre. Deux heures d’explosions non-stop, d’immeubles
qui s’effondrent dans de grands fracas de verre et d’acier – tout ça pour
s’apercevoir qu’au fond, ce n’est que ça : du verre et de l’acier. Jamais
on ne voit de victimes, je veux dire de vraies victimes ensanglantées –
seulement des rescapés aux vêtements noirs de poussière. C’est une apocalypse
qui ne concerne que les BTP, et je pense que c’est le principal problème du
film. On est dans du grand spectacle, personne ne dira le contraire, mais ça
reste de la baston de saloon inoffensive. Au lieu de s’écrouler sur des tables
dans de grands éclats de verres et de bouteilles, Superman et ses ennemis,
encaissant un coup, traversent une demi-douzaine de buildings dans les mêmes
grands éclats de verre. Mais ces buildings sont vides : pas de cris de
panique, pas de corps étendus sur l’asphalte, pas de mains sortant des gravats…
On en vient à se demander quel réel danger, au fond, court l’humanité.
Pourtant, ce n’est pas faute de nous en mettre plein la vue – mais c’est la
mort qui nous est cachée. Et quand un personnage est tué (le père), il trouve
le moyen de revenir en hologrammes pour aider son fils !

Mardi 2 juillet.
Je rédige
mon journal du week-end, ce qui me prend du temps, et comme les jours ne
s’arrêtent pas de passer, le retard dans ce journal va s’accumuler… Il n’y a
pas un bouton « pause » quelque part ?
Mercredi 3
juillet.
Écriture de
ma chronique sur le héros, thème choisi au dernier moment, et à défaut
d’autre chose. D’ailleurs, c’est un peu de cette façon que je les choisis
chaque semaine… Du coup, je me demande bien de quoi je causerai la prochaine
fois !
J’ai des
envies de films sanglants, en ce moment, et je revois Scream ce soir.
Jeudi 4 juillet.
Je suis
plutôt occupé par l’écriture, en ce moment, et je n’étais vraiment pas sûr
d’avoir envie de rejoindre Anthony et toute la bande aux Artistes pour un apéro
– d’autant plus que le ciel avait été plutôt couvert dans l’après-midi. Mais
voilà qu’à cinq heures, le soleil est revenu comme un invité de dernière
minute, et je me suis dit que l’écriture pouvait attendre.
Anthony est
avec Gabriel, Fabien, Guillaume Payen, un certain Clément, une fille dont
j’ignore le prénom, et qui tous travaillent à ERDF. Il y a également
Jean-Michel avec ses enfants, et les autres nous rejoignent petit à
petit : Stan, Line et Joséphine, Mickaël, Candice, Muriel, Yoan, Antoine…
Comme il y a des enfants, il est question des enfants, mais aussi de Zapoï (dont quelques exemplaires sont
posés sur les tables)… et du boulot, puisque Anthony, qui soupçonne Candice et
l’amie de Gabriel de se raconter des anecdotes de travail, est entouré de ses
collègues.
Je ne reste
pas très longtemps, afin de me remettre au travail sans y passer toute la
soirée. Dit comme ça, on croirait presque que j’ai décidé d’adopter enfin une
bonne discipline. En réalité, je m’octroie beaucoup de temps pour glander
aussi…
Vendredi 5
juillet.
Je pensais
passer au lycée une dernière fois pour aller consulter les tableaux des
résultats du bac et revoir les quelques collègues qui travaillent encore en ce
moment – mais j’y ai renoncé, finalement. Je prendrai le journal demain pour
voir les résultats.
Samedi 6 juillet.
J’ai une
commande d’articles sur des jeux vidéo et des thématiques cinéma à rendre en
début de semaine prochaine, il est temps que je m’y mette.
Dimanche 7
juillet.
Je vais voir
World War Z, en m’attendant au pire.
À vrai dire, ce n’est pas un mauvais film, il y a même des scènes assez
impressionnantes – le réalisateur ne mérite pas l’éreintement auquel il a eu
droit de la part des critiques. Alors, certes, les puristes du genre vont
s’offusquer : « Les zombies ne courent pas ! » Il faudrait
que tous les morts-vivants règlent leur pas sur celui de Bill Hinzman, le
premier zombie à apparaître dans La Nuit
des morts-vivants de Romero. C’est bien lui la référence en la matière, lui
qui a donné une allure, un comportement aux morts-vivants : lents,
boiteux, maladroits, plus sensibles au son qu’aux couleurs, etc. Mais il y a déjà
un petit moment que les films comme 28
jours plus tard ont donné un nouveau rythme aux individus infectés par les
virus étranges que concoctent les cinéastes – même si dans 28 jours plus tard, il n’est jamais question de zombies, mais
d’enragés. Max Brooks, dans son roman World
War Z, décrit bien des zombies lents, à la Romero. Mais au fond, ce n’est
pas vraiment le problème.

Bill Hinzman dans La Nuit des morts-vivants
Je
m’attendais à ce que le film n’ait absolument rien à voir avec le livre de Max
Brooks, qui est plutôt inadaptable au cinéma, mais là c’est quand même
impressionnant. À part le titre, j’ai du mal à voir un rapport entre les deux…
Sans compter Brad Pitt qui part d’un pays à l’autre pour trouver une solution à
la peste zombie alors qu’il n’y a aucun personnage principal dans le roman (ou
disons plutôt qu’il y en a autant qu’il y a de chapitres), le grand défaut du
film, c’est qu’il donne l’impression que tout se passe à cent à l’heure et que
le problème se retrouve réglé en l’espace d’une semaine, alors que Brooks
raconte une guerre mondiale qui s’inscrit dans la durée. Il aurait pourtant été
possible de reprendre des éléments du roman, de montrer différents conflits aux
quatre coins du monde (pas seulement sous forme d’extraits de journaux
télévisés), la bataille de Yonkers ou de Hope, des militaires en lutte contre
des hordes de morts-vivants… Mais non, tout tourne autour du personnage
interprété par Brad Pitt, or on ne fait pas la guerre tout seul. Une suite est
annoncée. Ce pourrait être une bonne nouvelle, qui règlerait au moins ce
problème de la rapidité apparente du conflit – mais pour retrouver un peu de
l’esprit du livre, il faudrait que cette suite démarre en Chine, par exemple,
ou en Russie, avec des acteurs chinois ou russes. Si c’est pour voir encore
Brad Pitt cavaler d’un avion à l’autre pendant deux heures…
Reste un bon
divertissement agrémenté de scènes choc, qui ne révolutionne pas le genre, mais
qui est loin de la médiocrité annoncée.
Le reste de
ma journée est consacré à la rédaction de trois articles.
Lundi 8 juillet.
Je fais un
dernier article ce matin pour pouvoir renvoyer ma commande en début
d’après-midi. Je dois consacrer cette semaine à ma chronique et au prochain
épisode de Bag of Bones, avant de
revenir aux biographies. Désormais, j’ai toujours au moins un texte à rédiger
chaque jour, voire plus – ce qui est un indéniable progrès sur mon oisiveté
passée. Mais ça n’empêche pas la procrastination…
Avec ce
soleil et cette chaleur me revient l’envie de me promener autour de Laval, pour
en tirer peut-être de nouveaux textes. Mais il faudrait que j’aie la volonté
d’ajouter à tout ce que j’écris en ce moment d’autres pages – et c’est à cet
endroit que la procrastination revient se greffer. Demain, je m’organiserai
mieux…
Mercredi 10
juillet.
Puisque les
coureurs du Tour de France passeront en Mayenne demain, sur l’étape
Fougères-Tours, j’ai décidé que ma chronique serait consacrée au sport. C’est
un thème que j’avais noté dans ma liste avant même de publier ma toute première
chronique, en mars, mais que je gardais en réserve, craignant de n’avoir pas
beaucoup de matière pour l’alimenter. Finalement, je ne m’en suis pas trop mal
sorti. Désormais, chaque semaine, le sujet de mon texte du jeudi est un
mystère. Même – et surtout – pour moi.
Jeudi 11 juillet.
Toujours
quelque chose à écrire : aujourd’hui, c’est un épisode de Bag of Bones. Il y avait une éternité
que je n’avais plus repris ce feuilleton, puisqu’un numéro de Tranzistor, celui du printemps, a sauté.
Je crois que la rédaction de l’épisode précédent remonte au mois
d’octobre !
Le soir, je
regarde Je suis une légende, avec
Will Smith – qui est un très bon film, ma foi, même s’il est une adaptation
très libre du roman de Matheson.
Dimanche 14
juillet.
Loin des Marseillaise et des engouements
patriotiques, je me consacre à mes textes de commande et achève la lecture de L’Homme des morts, de V.M. Zito, encore
une histoire de zombies – un roman qui m’a plu d’ailleurs, et Dieu sait
pourtant que la littérature n’est pas favorable aux morts-vivants, bien que
Richard Matheson ait ouvert la voie en 1954 avec Je suis une légende. Matheson qui, d’ailleurs, est mort le 23 juin
dernier, comme je viens de l’apprendre…
Ce soir,
tout de même, je sors profiter de la fraîcheur de la soirée – fraîcheur toute relative :
on peut se balader en tee-shirt sans crainte d’attraper froid – à l’occasion du
feu d’artifice. Je ne suis pas sensible à ce genre de spectacle, mais j’en
profite pour regarder les filles. Après le bouquet final, en creusant mon
sillon à travers la foule, j’ai surpris à deux reprises le genre de réflexions
« beauf » qu’on entend dans ces moments-là : « Ah !
Là, on les a vu partir, nos impôts ! »
Bien sûr, si
je trouve cette remarque ridicule, c’est certainement parce que je n’en paie
pas, d’impôts…
Lundi 15 juillet.
Le directeur
d’un lycée de Mayenne m’appelle aujourd’hui pour me proposer un poste de
« documentaliste et lettres modernes » (je suppose qu’il faut
comprendre « et professeur de français » ?) pour la rentrée, en
remplacement d’un congé maternité. Je le verrai la semaine prochaine pour en
discuter. Je ne vais pas trop m’emballer cette fois, de peur de voir le poste
me passer sous le nez comme en mars dernier. Évidemment, ce qui m’inquiète un
peu, c’est l’aspect « et lettres modernes » ; j’ai déjà
suffisamment écrit ici même combien je m’imaginais difficilement affronter une
classe d’une trentaine d’élèves…
Je me suis
lancé dans la lecture de Jules Verne – que je n’ai pratiquement jamais lu, je
dois l’avouer – en commençant par De la
Terre à la Lune. Je compte écrire un de ces quatre jeudis une chronique sur
la lune, où j’évoquerai Jules Verne, Laforgue, Cyrano de Bergerac (il faudra
que je lise également Les États et
empires de la Lune) et Camille Flammarion, entre autres…
Reçu une
assez grosse commande d’articles à rédiger et à rendre la semaine prochaine
(mercredi au plus tard). Il va donc falloir que dès demain, je m’occupe de ma
chronique. Comment vais-je pouvoir m’organiser, en septembre, si je travaille à
nouveau ?
Mardi 16 juillet.
Voilà, ma
chronique est prête pour jeudi. Je vais donc pouvoir – dès demain, parce que je
ne suis pas un bourreau de travail – m’occuper de la commande d’articles reçue
hier. Une dizaine d’articles entre 2000 et 3000 signes. J’ai intérêt à en faire
au moins deux par jour, et plus si affinités…
Mercredi 17
juillet.
Je suis
vraiment un indécrottable loser… Alors que je devrais me réjouir que le lycée
de Mayenne me propose une nouvelle fois de travailler avec eux, je n’en ressens
que de l’angoisse. En mars, ils me proposaient un poste de documentaliste, et
j’étais parfaitement ravi de cette chance – mais je n’ai pas été pris. Cette
fois, il faudrait vraiment que je le sois… mais l’idée d’être à la fois
documentaliste et prof de français me
terrorise. Je ne sais même pas comment on prépare un cours, moi ! Et à
quel moment je saurai quel est le programme de l’année ? Et de combien de
classes devrais-je m’occuper ? Une fois de plus, il est idiot de
s’inquiéter avant même d’avoir passé l’entretien, mais je ne peux pas m’en
empêcher…
Écriture
d’un texte sur L’Écume des jours – le
film de Gondry. Je comptais écrire deux textes aujourd’hui, mais celui-ci
épuise toute mon énergie (déjà plutôt pauvre, avouons-le). Pourtant, ces petits
articles de commande ne me posent généralement pas de problèmes…
Jeudi 18 juillet.
Anthony et
ses collègues ont prévu un apéro aux Artistes. J’ai un texte en chantier,
encore un petit texte de 2000 signes qui ne devrait pas me poser trop de
problèmes, surtout que je l’abandonne après en avoir rédigé la moitié, laissant
la suite pour ce soir. Je retrouve donc Fabien et Anthony aux Artistes,
Guillaume Payen nous rejoint, puis Candice, Séverine et Simon accompagnés de
Capucine, Yoan, Marie et Charles, et quelques autres… Il est question de la
dernière livraison de la revue Feuilleton
et notamment de l’article consacré au « pickpocket » Apollo Robbins,
de la première victoire française du Tour de France, des baies de goji, mais
surtout des vacances et des voyages, Anthony et Candice ayant prévu d’assiéger
Berlin, Charles et Marie se rendant sur la Côte d’Azur… Okay, s’il en faut un
qui reste en Mayenne pendant ce temps, je serai celui-là (une fois de
plus) ! Charles me propose tout de même, pour l’été prochain, de l’accompagner
dans des randonnées en montagne. Je suis partant – mais qu’en sera-t-il de ma
vie l’année prochaine ?...
Séverine et
Simon ayant acheté un mölkky, il est décidé que nous en ferons une partie au
square de Boston. Un peu hésitant d’abord (il faut que je me remette à écrire,
bla, bla, bla…), je me laisse convaincre. Après une escale au Marché Plus pour
acheter quelques victuailles, nous nous retrouvons donc au square. C’est là que
Séverine et Simon s’aperçoivent qu’ils ne retrouvent pas le carnet de mölkky
censé accompagner leur jeu. Ce mystère demeurera, heureusement Yoan possède une
application « mölkky » sur son téléphone portable – nous sommes
sauvés. On commence par la répartition des équipes, que l’on choisit d’établir
en fonction des bacs passés par chacun de nous. C’est ainsi que Candice et Yoan
forme l’équipe des bacs ES, Anthony et Simon celui des bacs D, et Séverine,
Marion et moi celui des bacs L. La partie commence très bien : les L
remportent la première manche, grâce à un esprit d’équipe en béton armé et au
lancer final de Séverine. La deuxième manche est gagnée par les bacs D, et la
troisième par les bacs ES. Il faut donc une bonne fois pour toutes nous
départager, et c’est Anthony et Simon qui remportent la victoire finale. Les
scores ont été serrés, le suspense intense jusqu’au bout : aucun de nous
n’a démérité, même pas Capucine qui se faisait dans son coin une partie d’Angry Birds (ou d’autre chose).
De retour
chez moi, je me remets à mon texte, atteins enfin – avec les plus grandes
difficultés – les 2000 signes… tout en me disant, comme hier, que ce genre de
textes, habituellement, ne me pose pas autant de problèmes. Du coup, par
curiosité, je vérifie ma commande : il s’agissait de textes de 1000
signes ! Nom de Dieu ! Depuis hier, je me suis fatigué à rallonger la
sauce de mes textes pour rien, et
maintenant je dois supprimer une partie de ce que j’ai fait. Si je n’avais pas
peur de me faire mal, je me mettrais des gifles…
Vendredi 19
juillet.
Le plus
ennuyeux dans cette histoire, c’est que si je ne m’étais pas échiné à écrire
des textes trop longs, j’aurais pu en écrire quatre ces deux derniers jours, au
lieu de n’en pondre que deux… Du coup, aujourd’hui, je rattrape le temps perdu
en en rédigeant trois !
Samedi 20
juillet.
Assommé par
la chaleur orageuse qui règne depuis plusieurs jours maintenant, je décide de
m’octroyer une pause dans mes écrits de commande. Je m’y remettrai
demain : après tout, le dimanche est le jour du travail, pour moi…
Je ne sais
vraiment pas comment je pourrai m’organiser si je recommence à travailler en
septembre, surtout si j’ai des cours à préparer (mais comment prépare-t-on des
cours, bon Dieu ?). D’autant plus que je tenterai une nouvelle fois le
CAPES de documentation, et qu’il faudra donc que je révise… Peut-être qu’en
instaurant des journées de 48 heures…
Dimanche 21
juillet.
Comme prévu,
je me consacre à l’écriture : un article sur le festival de Deauville, un
autre sur les personnages célèbres au cinéma (Camille Claudel, Truman Capote,
Margaret Thatcher, etc.). Il aurait fallu que j’en fasse d’autres, mais la
chaleur et la flemme ont eu raison de ma motivation. Heureusement, l’orage a
fini par éclater dans la soirée (et heureusement, je n’étais pas dessous, cette
fois…).
Lundi 22 juillet.
Finalement,
l’orage ne change pas grand-chose : la chaleur est toujours aussi
étouffante. Ceci dit, je trouve plutôt intéressant de nous laisser profiter du
soleil dans la journée et de ne laisser parler la foudre que le soir. C’est
encore ce qui se passe aujourd’hui. Timing
remarquable.
Je sais de
quoi parlera ma prochaine chronique. Et c’est une bonne chose, puisque je
compte bien l’écrire demain, étant donné que je passerai la journée à Mayenne
mercredi… Pour ce texte, je resterai dans une thématique estivale et causerai
de la littérature de plage. Pour n’en rien dire vraiment, d’ailleurs :
surtout pour parler. Je consacre ma soirée à des articles de commande.
Mardi 23 juillet.
Anthony n’a
rien trouvé de mieux, pour lutter contre la chaleur, que d’organiser une danse
de la pluie autour de l’arbre planté devant le bar des Artistes. Au moins, lui
a proposé quelque chose, pas comme ces politiciens qui font semblant de ne rien
voir… Bon, en fait de lutte contre la chaleur, il s’agit évidemment de se
rafraîchir le gosier après le boulot – puisque les trois quarts des personnes
présentes sont des employés d’ERDF qui ont achevé leur journée. Il est donc un
peu question du travail, beaucoup question des vacances (mais quand on parle
des vacances, on parle toujours un peu du travail…), des grilles de mots
fléchés (Fabien est déjà en vacances, il a donc acheté l’accessoire
indispensable du vacancier), des bars lavallois cités dans le guide Lonely Planet des Pays de Loire, du film
The Human Centipede… Je ne reste pas
longtemps parce que je veux écrire ma chronique ce soir, afin de ne pas avoir à
le faire demain, après mon entretien à Mayenne. À ce propos, je craignais de
devoir passer toute la journée à Mayenne, mais non : il y a des cars qui
font la navette jusqu’à Laval le midi. Je vais devoir poireauter un bon moment,
avant et après mon entretien, mais au moins, je serai rentré plus tôt que la
dernière fois. Du coup, rien ne m’empêcherait d’écrire mon texte demain, mais
je préfère m’en occuper ce soir, et en être débarrassé.

Mercredi 24
juillet.
Je me lève
aux aurores pour prendre le car de 8 heures pour Mayenne, un peu comme si je
partais en vacances. Sauf que je pars plutôt pour un futur boulot… Je descends
à 8 h 45 à la gare de Mayenne, mon rendez-vous n’est qu’à 10 heures. J’ai donc
un peu de temps à tuer, et c’est à la terrasse de la Renaissance que je vais
lui régler son compte. En buvant mon café, je me dis que décidément, Mayenne a
un aspect de petite ville portuaire que je ne m’explique pas. Peut-être que ça
vient simplement du fait que je la vois sous le soleil… Et puis, me trouver à
la terrasse d’un café à neuf heures et demie du matin, ça ne m’arrive guère que
lorsque je suis en vacances au bord de la mer ! Si je ne m’abuse, la
dernière fois que cela s’est produit, c’était en 2011, à Paimpol, avec
Jacques-Pierre Amette…
La rencontre
avec le directeur du lycée est très brève, il ne s’agit même pas d’un entretien
visant à savoir s’il va m’embaucher ou pas : la question ne se pose pas.
Il m’explique en quoi consistera mon travail : 25 heures de documentation
au CDI, et 5 heures de cours pour une classe de sixième. Je commencerai le 22
septembre, ou peut-être plus tôt, puisque je remplace deux professeurs en
congés maternité (qui, donc, se sont débrouillées pour que leurs congés tombent
au même moment, ce qui dénote un esprit d’équipe peu commun !). À vrai
dire, je me sens rassuré : 5 heures de cours de français par semaine,
c’est faisable, a priori, surtout avec une classe unique, et surtout avec des
sixièmes. Je m’imaginais déjà enseignant à plusieurs niveaux, y compris à des
premières (avec le bac à préparer) – vision d’horreur à m’en faire dresser les
cheveux sur la calvitie…
Puisque je
ne suis resté qu’un petit quart d’heure dans le bureau du directeur et qu’il
n’y a pas de car avant 12 h 30, je me promène dans les rues de Mayenne, mange
un sandwich à l’ombre, sur un banc du jardin public entourant le château et
surplombant la rivière. Je me sens l’âme d’un touriste. Ça ne durera pas, puisque
pendant quatre mois, je vais être amené à voir cette ville régulièrement !
Soirée
Carpenter ce soir, avec The Thing. Eh
bien ! Je pensais que ce film génial qui se déroule dans la neige me
rafraîchirait un peu… C’est raté.
Jeudi 25 juillet.
Retour à une
grasse matinée bienvenue. Au fond, cette fois, je peux me déclarer vraiment en
vacances, et non plus au chômage, puisque j’ai au moins la certitude de
travailler à la rentrée, jusqu’aux vacances de Noël… Je vais préparer
consciencieusement mes cours en m’appuyant sur le programme de la classe de
sixième – mais je m’y mettrai au mois d’août. Pour l’instant, j’ai un court
article publicitaire à écrire pour une agence de location de voitures, je m’en
occupe donc et savoure ensuite mon oisiveté.
Le soir, je
regarde la première adaptation cinématographique de Je suis une légende (The Last
Man on Earth, 1964), avec Vincent Price. Adaptation très fidèle au roman de
Matheson – ce dernier ayant d’ailleurs participé à l’écriture du scénario – et
qui préfigure La Nuit des morts-vivants,
sorti quatre ans plus tard. Un même noir et blanc englobe ces deux films, et
les zombies de Romero ressemblent beaucoup aux vampires de Je suis une légende, depuis leur déplacement lent et maladroit
jusqu’à leurs regards inexpressifs. Richard Matheson, à la parution de son
livre en 1954, avait posé tous les codes du genre dont Romero allait s’emparer
(en avouant s’être inspiré de ce roman) : la maison assiégée par les
morts, qu’il faut barricader ; la survie au quotidien (approvisionnement
en vivres, en essence, en armes…) ; les vampires/zombies, faciles à
neutraliser lorsqu’ils sont seuls, mais redoutables quand ils avancent en
nombre ; les proches, jusqu’à l’enfant et la femme aimée, qui peuvent
devenir un danger mortel s’ils sont contaminés… Ce dernier point, d’ailleurs,
est totalement absent du film World War Z.
Dans un blockbuster familial, mieux vaut ne pas laisser entendre que votre
gentille fillette ou votre épouse sont susceptibles de vous sauter à la gorge
si elles ont été mordues…

Vendredi 26
juillet.
Ce soir, je
revois White Zombie, de Victor
Halperin, avec Bela Lugosi (1932). Le tout premier film de zombie, qui se passe
dans un Haïti peuplé de blancs (il y avait encore peu d’acteurs noirs à
Hollywood, encore moins dans des rôles principaux). Le scénario simpliste et
l’histoire romantique qui est au cœur du film lui donnent aujourd’hui un air de
gentil nanard. Il a pourtant profondément marqué les esprits, autant que les
autres grands films d’horreur de l’époque : Frankenstein, Dracula
(1931) ou King Kong (1933) !
Samedi 27
juillet.
Un an jour
pour jour après la «
plus petite apocalypse du monde », l’inondation
de Laval par une belle après-midi d’orage – on remet ça. Et comme je suis le
type le moins original du monde, je me trouvais exactement au même endroit que
l’année dernière, à la Médiapole, quand les torrents de flotte ont commencé à
rouler dans la rue du Général-de-Gaulle. Comme l’année dernière, le hall de la
Médiapole a vite été totalement inondé, des clients se pressaient sur la
passerelle pour prendre des clichés avec leur téléphone portable… Seulement
moi, contrairement à l’an dernier, je ne me faisais aucun souci. Les employés
de Chapitre couraient dans tous les sens, et moi je me disais simplement qu’il
n’y avait qu’à attendre que ça se calme, que le niveau de l’eau baisse, et
voilà tout. Une vendeuse qui se tenait à la caisse est montée à l’étage, les
pieds nus et l’air quelque peu paniqué, pour prévenir les clients que les
caisses étaient fermées et qu’ils ne pourraient pas acheter de livres
aujourd’hui. Comme l’année dernière, la sortie du magasin s’est faite par la
rue Souchu-Servinière, mais cette fois, j’ai attendu que la rue ne soit plus
inondée pour quitter le magasin. Et je suis rentré chez moi en faisant un
détour par la rue Saint-Martin, les pieds parfaitement secs. Quand on a vu une
apocalypse, on les a toutes vues.
Encore un
film des frères Halperin ce soir, La
Révolte des zombies (1936). Il ne s’agit d’ailleurs pas réellement de
zombies, mais plutôt d’individus sous contrôle, en état d’hypnose. Mais encore
une fois, ce film qui n’a l’air de rien préfigure un thème qui fera florès,
celui de l’armée des zombies. Pendant la Première Guerre mondiale, un officier
rencontre un prêtre cambodgien capable de contrôler une armée de zombies
qu’aucune balle ne peut faire reculer. Il envisage ce qu’une telle armée
pourrait apporter aux forces alliées, mais après toute une série de péripéties,
c’est lui-même qui apprendra à dresser des zombies pour reconquérir la femme
qu’il aime et qui l’a trahi. Et ces armées de zombies auront beaucoup de succès
au cinéma après la deuxième guerre mondiale : ce sont généralement les
nazis qui s’amusent à réveiller les morts, comme dans Le Commando des morts-vivants, entre autres…
Dimanche 28
juillet.
J’ai une
cinquantaine d’entrées de dictionnaire à rédiger. Ce ne serait pas très
difficile, et même plutôt amusant, s’il n’y avait pas une contrainte absurde à
suivre : chaque entrée doit compter une moyenne de deux cents signes, quel
que soit le mot à définir. Or, le but d’un dictionnaire est de donner la
définition la plus concise possible d’un mot ! Et la plupart du temps, je
me trouve obligé de complexifier ma définition afin d’atteindre mes deux cents
signes… D’autre part, il y a parmi ces mots à définir, des mots anglais que je
dois donc traduire en français, et auxquels je dois ajouter (toujours pour
atteindre les deux cents signes) un exemple… en anglais ! Heureusement que
je maîtrise un peu la langue de Johnny Rotten…
Toujours
dans mon exploration des films de zombies antérieurs à Romero, je regarde King of the zombies ce soir. Un film de
1941 dans lequel un avion s’écrase sur une île où une espèce de savant fou, à
l’accent germanique, utilise l’hypnose et la magie noire pour créer un groupe
de zombies. Toujours la même histoire, au fond, mais c’est un film très drôle,
notamment grâce à un personnage de domestique noir forcément peureux,
superstitieux et ridicule, mais qui s’avèrera le véritable héros et donnera
même le mot de la fin, superbe morale à méditer : « Il n’y a pas de pire expérience que celle d’être transformé en
zombie ! »
Lundi 29 juillet
2013.
Encore des
zombies ce soir (ma « dévédéthèque » en regorge) : Le Commando des morts-vivants (Shock Waves),
un film de 1977 avec Peter Cushing et John Carradine. Un film à petit budget
pas si nanardesque que ça, notamment grâce au réalisateur qui a eu la bonne
idée de ne pas chercher la surenchère d’effets spéciaux. Drôles de zombies
aryens et amphibies, parfaitement blonds et élégants dans leurs uniformes SS.
Au même moment, Arte rediffusait La Maman
et la putain, en hommage à Bernadette Lafont, qui vient de mourir. Mais La Maman et la putain, c’est un film que
je connais par cœur, et je n’avais pas le courage de regarder un film de 3
heures et 40 minutes ce soir, surtout dans une version streaming de mauvaise
qualité. Si encore, j’avais eu la télé…
Par ailleurs,
je suis plongé dans la lecture de L’Homme
qui rétrécit, de Richard Matheson, qui a le don, décidément, pour faire
entrer le fantastique et l’épouvante dans le quotidien le plus banal…
Mardi 30 juillet.
J’ai un gros
arrivage de commandes d’articles assez urgents, rien de difficile à faire, mais
ils viennent s’ajouter à mes définitions de dictionnaire. J’en suis à me
demander si je ne vais pas prendre une semaine de vacances dans ma Bibliothèque de Jupiter, puisque je n’ai
toujours pas de sujet en tête et que ça devient problématique. En cette
période, une semaine sans chronique ne devrait pas déranger grand monde,
puisque la plupart de mes lecteurs sont en train d’attraper des mélanomes sur
les plages… Mais je ne sais pas, un vieux fond de culpabilité me pousse à
refuser de m’inventer ce genre d’excuse… Serais-je encore plus catholique que
je ne le crois ?
Chef d’œuvre
trop méconnu ce soir, avec Dellamorte
Dellamore de Michele Soavi, l’un des films dont l’humour noir s’accorde
certainement le plus au mien, avec ce goût pour le macabre, les cadavres et la
pourriture ; et sans doute l’un des films dont l’érotisme m’a le plus
marqué quand je l’avais vu à seize ou dix-sept ans. La nécrophilie, dans ce
film, est d’une élégance et d’un raffinement rares, à mille lieues du sordide…
Jamais la mort n'a été aussi sexy...
Mercredi 31
juillet.
C’est
décidé, je vais me faire haïr des – disons – deux personnes et demie qui lisent
encore ma chronique malgré l’appel des planches à voile et du pastis, mais je
vais m’octroyer une trêve cette semaine. La première depuis que j’ai commencé
cette potacherie hebdomadaire. Je peux bien me permettre de tirer un peu au
flanc…