mardi 26 juin 2007

Voyage à Istanbul (2/15)



Lundi 7 juillet 2003.


Réveillé vers 6 heures par les bruits de la ville : trompes de bateaux, trafic, mouettes… C'est à 9 heures que je me lève pour terminer le compte-rendu de ma journée de la veille alors que Sébastien dort encore. Il se lève à 10 heures, trop tard pour le petit déjeuner. Nous rangeons nos affaires et reprenons la route de l'hôtel Erboy. Notre chambre est la 312, une petite chambre aux meubles verts, aux rideaux et aux couvre-lits rouges. Topkapi et Sainte-Sophie sont à quelques mètres - c'est donc tout naturellement par là que nous nous dirigeons. Nous passons devant la Sublime Porte, longeons les remparts de Topkapi par une petite rue qui monte, aux bâtiments de bois. Nous voilà devant la porte du palais, et devant celles de Sainte-Sophie. Nous ignorons les porteurs d'eau et les passants intéressés qui veulent s'improviser guides et nos pas nous mènent devant la Mosquée bleue, faisant dégouliner ses dômes et dressant ses six minarets. En face, derrière nous, Sainte-Sophie la rouge. Après être entrés dans la cour intérieure de Sultanahmet, nous laissons nos chaussures dans un sac et pénétrons dans la mosquée. Saisissement devant la beauté, l'immensité du lieu. Sous les cercles d'ampoules, nous ne sommes plus rien devant ces colonnes d'or et de faïence bleue. Nous jouissons du plaisir de marcher en chaussettes sur la moquette. Nous ressortons dans les jardins du monument, regardons la Marmara et la rive d'Asie, au loin, entre les maisons.


Une fois dehors, nous délaissons encore les quidams qui nous veulent du bien - " Hey ! You look Turkish ! Can I help you ? " - et poursuivons notre route vers le Grand Bazar. Le temps est assez clément, la mer nous apporte un petit vent agréable, mais la marche nous use vite. Je commence à avoir très soif, la bouche aussi sèche que si je mâchouillais une semelle. Nous entrons dans le Grand Bazar après avoir traversé des rues pleines de monde, de marchands ambulants, de voitures, de taxis, de tramways. Boutiques de bijoux, les unes à côté des autres, puis au détour d'une galerie : parfums et tissus, cuir à gogo, dans des mélanges d'odeurs captivantes. Il fait très lourd ici, nous ressortons et nous voilà dans le coin des vêtements : " tekstil ", c'est ce qu'annoncent tous les magasins. Mes jambes n'en peuvent plus, nous nous asseyons à même le sol dans une petite galerie marchande bâtie sur plusieurs étages. En contrebas, une fontaine offre un point de vue rafraîchissant. Cette fois, nous décidons vraiment de nous mettre à la recherche d'un café. Le quartier vers lequel nous allons semble plus porté sur l'alimentaire : les kebabs se suivent comme les bijoux, puis les tekstil, tout à l'heure. Nous dénichons une terrasse face à la Corne d'Or et à la tour de Galata et commandons du jus de cerise (" visne suyu "). C'est là qu'en potassant le Guide du Routard, Sébastien constate que nous sommes passés sans le savoir du Grand Bazar au Bazar égyptien. Nous nous prélassons un moment à l'ombre de notre terrasse, il est à peine 15 heures mais nous décidons de rentrer à l'hôtel non sans avoir acheté une bouteille d'eau et du jus de cerise au supermarché face à celui-ci.


De retour dans notre chambre, donc, nous nous rafraîchissons, nous nous prélassons, fourbus. Je ne suis pas loin de m'endormir et je crois que Sébastien en a été encore plus près. Vers cinq heures je me ressaisis pour écrire ces lignes, sous la chaleur qui est revenue et tandis que résonne le chant triste du muezzin.


Vers 18 heures, nous ressortons. Le temps dehors s'est de nouveau rafraîchi, la promenade est plus appréciable. Sébastien a repéré un petit restaurant sur le Guide du Routard, le Karadeniz, et nous y allons. Sébastien entre bille en tête, voulant suivre les conseils du Guide et s'installer au premier étage. Mais le patron ne veut pas que nous montions et nous désigne la terrasse, sans doute pour que nous restions visibles des passants. Nous nous asseyons, le serveur nous tend les menus rédigés en anglais, je commande un kebab en voyant inscrit le mot " eggplant ". Je me dis que ça doit avoir un rapport avec les œufs. Je m'attends à recevoir un plat contenant de la viande et une sorte d'omelette, quelque chose comme ça. Nous faisons connaissance avec notre voisin de table, un Français d'origine asiatique, N'Guyen, avec qui nous nous mettons à parler du Guide du Routard, justement, et des voyages que lui a fait. Il est à Istanbul pour le mariage d'une amie, mais il a aussi voyagé en Jordanie, en Syrie, au Vietnam, dans le Sahara… Ce qui explique qu'il arrive assez facilement à se faire comprendre des serveurs : l'habitude des voyages. Les kebabs arrivent sans se presser, et je me rends compte de mon erreur : " eggplant ", c'est l'aubergine. Je ne suis pas très fort sur l'aubergine, mais j'essaie tout de même de lui faire un sort. Je goûte au fameux " ayran ", yoghourt liquide salé, très rafraîchissant. Le plat est très épicé et s'achève par un thé turc, c'est à dire coriace. N'Guyen nous quitte et nous nous en allons peu de temps après. Nos autres voisins sont français aussi : deux femmes et deux enfants. Elles nous expliquent qu'elles viennent de Bulgarie où vit l'une d'elles, mais qu'elles ont eu des problèmes : elles devaient faire le trajet dans la voiture d'un mari, mais la Bulgarie possède une réglementation très stricte concernant les voitures qui passent la frontière, à cause des nombreux trafics de voitures volées. La femme n'ayant pas sur elle de papiers stipulant que son mari était au courant qu'elle conduisait sa voiture, elles ont dû se résoudre à rejoindre Istanbul en car.


Nous traînons un peu dans le quartier, au loin les supertankers se croisent sur le Bosphore dans le jour qui décline. Sur l'hippodrome de Sultanahmet nous admirons l'obélisque de Théodose, la colonne serpentine et l'obélisque muré dans le soleil couchant. À neuf heures commence le spectacle son et lumières en français à la mosquée de Sultanahmet. Nous nous y installons, un type passe et repasse en essayant de vendre du thé. Nous revoyons N'Guyen, qui mange du maïs grillé. Son et lumières sans surprise, le texte est dit par Jean Piat. Nous retournons tranquillement à l'hôtel. Le problème de cet hôtel, c'est qu'il n'y a pas d'air. Le temps à l'extérieur peut-être très doux, nous suons très vite… Une bonne douche, mon journal et au lit.

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